Dits, Chants et Danses Populaires du Limousin

Dits, Chants et Danses populaires du Limousin – Volume 1

Vinyle 33T

Les Musiciens routiniers du Limousin

Disques Vendémiaire

VD33116 AD37

1981


Contes, musique d’expression populaire, chants d’amour et de tristesse prennent racine au plus profond de la montagne limousine.
Nous ne sommes pas allés loin pour les trouver.
Ils étaient à notre porte.
Il nous a suffi de les écouter et ils ont resurgi, aussi clairs, frais et neufs que l’eau des sources du plateau.
Merci à tous ceux qui nous ont permis de les découvrir et de les faire connaître.

Myette Marouby
Les musiciens routiniers du Limousin

 

Les textes en limousin ont été écrits grâce à l’aide de Marcelle Delpastre.

Recherches, textes et maquette : Paulette et Myette Marouby

Prise de son : Jean-Pierre Graziani

Montage : Myette Marouby et Jean-Pierre Graziani – Au studio : JEF GILSON – Novembre 1981

Imprimé en France – GRIMOFFSET – 94400 Vitry

Face A

1 – La mantille – Marcelle Delpastre – 3 mn 15

2 – « Je suis lasse d’être fille… » – Bernard Plas, accordéon chromatique – 1 mn

3 – « La n’emmenan la paubra novia… » – Marcelle Delpastre – 30 s.

4 – Rosette – Bernard Plas, accordéon chromatique – 1 mn

5 – Roseta se marida – Marcelle Delpastre – 1 mn 30

6 – « là-bas, là-bas dans la prairie… » – Bernard Plas, accordéon chromatique – 1 mn

7 – « Petit papillon volage… » – Marcelle Delpastre – 2 mn

8 – Marche devant les mariés – François Maltieu [Malthieu], violon – 37″

9 – Maridan la Mietto – Constance Manoux – 2 mn 30

10 – Marche de noce « de l’Arabe » – Jean-Pierre Champeval, Jean-Michel Ponty, violons – 3 mn

Face B

1. « Quand lou marle es din lou pra… » – Daniel Caraminot, accordéon – Jean-Michel Ponty, vielle – 1 mn 30

2 – Le Chaudronnier – Marcelle Delpastre – 3 mn

3 – Valse « de Nard » – François Maltieu [Malthieu], violon – 1 mn 30

4 – Céline – Marcelle Delpastre – 3 mn

5 – Valse « de St-Salvadour » – Jean-Pierre Champeval, Jean-Michel Ponty, violons – 2 mn 30

6 – La Margui – Constance Manoux – 2 mn

7 – Scottisch – Jean-Pierre Champeval, violon – Jean-Michel Ponty, vielle – 2 mn

8 – Conte de la vieille et des trois voleurs – Marcel Delpastre – 3 mn

Face A

1 – La Mantille

Marcelle Delpastre

Chanson ancienne (18e siècle), traditionnelle, mélodie lente, traînante sur le thème de « la bergère et du seigneur » mais avec réalisme. La bergère emploie des expressions en limousin ce qui peut faire supposer que la chanson a été traduite du limousin au français, à la fin du 19e et/ou « récupérée » par les chanteurs régionaux.

Marcelle Delpastre

Ecrivain de langue occitane. Collaboratrice de la revue « Limouzi ». Elle a écrit, entre autres :

  • Lor Conte de Vira-Boton, in « Limouzi », 1978
  • Lo Contes dau Puèg Gerjan, in « Limouzi », 1970
  • Saumes Pagans, IEO, 1974

Elle vit à Germont de Chamberet.
Nous sommes allés enregistrer Marcelle Delpastre, le 30 novembre 1980.
La neige et le verglas de l’hiver précoce recouvraient la campagne et les routes.
Gens et bêtes s’étaient mis à l’abri, au chaud, dans la cuisine, près de la cheminée, dans le cantou.
Autour de la conteuse-chanteuse, chacun vaque à ses occupations : Marie-Louise Delpastre, la mère, prépare le dîner, soutient la mémoire de sa fille, fait des commentaires sur ce qui se dit ou sur ce qui se chante ; une poule, éclopée, a fui le poulailler et caquette ; le chat s’exprime lui aussi en miaulant… Les bruits de la vie, tout simplement.

Ecole de Bourrée de Davignac

L’école de bourrée regroupe, autour de Daniel Caraminot, son animateur, jeunes et moins jeunes de Davignac et des environs pour chanter, danser et jouer des airs populaires de la région.
Daniel Caraminot et Bernard Plas jouent de l’accordéon ; ils ont un jeune élève, Jean-Jacques Chanterie. Thierry Monéger apprend à jouer de la cabrette.

 

2- « Je suis lasse d’être fille… »

Bernard Plas à l’accordéon

Marche de noce.

Pour « mener » les mariés et le cortège des invités, de la maison à la mairie, de la mairie à l’église et pour les faire danser, il y avait toujours un musicien, vielleux, violoneux, plus tard, accordéoniste. Les paroles qui permettaient aux gens de mémoriser les airs sont souvent ironiques et paillardes.

« … et je veux me marier ! »

La jeune fille cherche surtout un mari « bien gentil ».

Le thème de la « mal-mariée » est un thème très ancien, venu du moyen-âge. Il est repris très souvent sous des formes différentes.

 

3 – « La n‘emmenan la paubra novia… »

Marcelle Delpastre

Marche de noce.

Même si ce jour-là on mangeait bien, ce n’était pas « toujours noce » dans la campagne limousine et la mariée le savait bien !

La n‘emmenan la paubra nòvia
La n’emmenam què pura tant.
Nos la sautam de « chas la Meseria »
Per la menar « chas Creba de fam »

Nous l’emmenons, la pauvre mariée,
Nous l’emmenons qui pleure tant !
Nous la sortons de « chez la Misère »,
Pour la mener « chez Crève de faim ».

 

4 – Rosette

Bernard Plas – accordéon

Air bien connu en Corrèze. Jean Ségurel l’a popularisé.

C’est une marche de noce, dont les paroles, en français, très proches de la chanson suivante, évoquent le mariage d’une très jeune fille avec un vieillard.

Jean Ségurel

Accordéoniste corrézien de Chaumeil, décédé en 1979.
A une époque où la musique traditionnelle populaire était peu recherchée, Jean Ségurel a su la mettre en valeur. Ainsi, grand nombre de danses et de chants recueillis par lui, dans son entourage, continuent à vivre.

 

5 – Roseta se marida

Marcelle Delpastre

Le mélange limousin-français est fréquent dans les chansons populaires.

ROSETA SE MARIDA…

A quatorz’ans’demi, la Roseta se marida (bis)
Ambe brave jeune òme de quatre vinc dix ans
« La petite Rosette passera mal son temps ! »

Il la prend « pour » la main, à la mairie « l’emmènò »,
Devant Monsur lo Maire e Monsur lo Curet.
E vivat la Roseta e son maridatge !

Il la prend « pour » la main, à table, il l’emmène :
« Minje, ma Roseta ! Essuenha tas barbas,
Releva bien ta servieta e ne te chaulias pas ! »

Il la prend « pour » la main, se coucher il « l’emmènò »
« Coija-te, ma Roseta, releva ben los draps,
Baissa ben ta chamiseta, « car tu n’auras pas froid ! » 

 

ROSETTE SE MARIE…

A quatorze ans ‘demi, la Rosette se marie
Avec un brave jeune homme de quatre-vingt-dix ans…

Il la prend par la main, à la mairie l’emmène,
Devant Monsieur le Maire et Monsieur le Curé
Et vive la Rosette et son mariage !

« Mange, ma Rosette ! Essuie « ta barbe »,
Relève-bien ta serviette et ne te souille pas ! »

« Couche-toi, ma Rosette ! relève-bien les draps,
Baisse bien ta chemisette, car tu n’auras pas froid ! »

 

6 – « Là-bas, là-bas… »

Bernard Plas – accordéon

Marche de noce. B. Plas enchaîne sur l’air de « la Yoyette ».

Les deux thèmes musicaux sont très populaires et pas seulement en Limousin.

 

7 – Petit papillon volage

Marcelle Delpastre

Chanson du 19e siècle qui prend ses racines à une époque plus lointaine : elle décrit une scène de rapt ; la belle est enlevée par son galant. Le rossignol, habituellement complice et confident des amants, est ici une « vilaine bête ».

 

8 – Marche de noce

François Maltieu [Malthieu] – violon

C’est une marche que François Maltieu [Malthieu] a maintes fois jouée devant les mariés.

Les Musiciens routiniers du Limousin

Jean-Pierre Champeval et Jean-Michel Ponty sont membres de cette association. Depuis plusieurs années, ils effectuent un travail de recherches dans la région des Monédières et du Plateau de Millevaches. Ils ont retrouvé, enregistré les musiciens âgés dont beaucoup d’entre eux avaient abandonné leur instrument. Ils ont joué avec eux, leur ont redonné courage, goût et envie de jouer. François Maltieu [Malthieu] est un de leurs amis : il vit à Lacombe de Tarnac et ressort toujours son violon avec un vif plaisir. (cf. le disque Violoneux Corréziens, Production P3)

 

9 – Maridan la Mietto

Constance Manoux

Le récit est presque le même que celui de Rosette.

D’autres personnages interviennent : la servante, la mère, Bernòta.

Les mariages entre un homme âgé et une très jeune fille étaient fréquents, jusqu’au début du 20e siècle. C’était le plus souvent des mariages de raison, arrangés de toute pièce par les parents de la fille afin de bénéficier de l’héritage.

Mais, d’une façon générale, les jeunes gens se mariaient, après avoir fait le service militaire qui pouvait durer jusqu’à sept ans, donc vers la trentaine ; les jeunes filles, très jeunes.

MARIDAN LA MIETTO

Maridan la Mietto a l’atge de quinze ans | bis
La maridan embe òme de seissanta detz ans
O guè guè la daridou
La daridéra lou lou la !

La sera de sas nòças – Li vira lo costat | bis
E vira-te, grand bogre,
Sè pòdes te virar !
O gué gué…

La sirvante lai monta « Vielhard, esvelhatz vos ! | bis
Consolatz la Mietto
Que pura auprès de vos. »
O gué gué…

« Que pure, que surpure, Laissatz-la surpurar ! | bis
Se ela a l’amor en testa,
Ieu ne l’ai pas ! »
O gué gué…

Lo lendemau de sa noça – Chas sa maire s’en vai | bis
« M’avetz fait prendre un òme
Que jamai n’aimarai ! »
O gué gué…

« Consòla-te, ma filha – Beleu n’en morirà ! | bis
Tu seràs l’eretiera
De tot ço que li aura ! »
O gué gué…

« O diable, la fortuna – Quand lo placer li es pas ! | bis
N’aimerai maï un jeune bien escarabilhat,
Remudariá la palha,
Farià fugir lo rat ! »
O gué gué…

« N’aimarai maï Bernòta – E ses tres mila francs | bis
Que quela vielha ròssa
Mai tote son argent ! »
O gué gué…

 

ON MARIE LA MIETTE

On marie la Miette – A l’âge de quinze ans | bis
On la marie avec un homme
De soixante-dix ans !
O gué gué la daridou,
La daridéra lou lou la !

Le soir de sa noce il lui tourne le dos | bis
Et tourne-toi, grand bougre,
Si tu peux te tourner !
O gué gué…

La servante y monte : « Vieillard, réveillez-vous ! | bis
Consolez la Miette
Qui pleure auprès de vous ! »
O gué gué…

« Qu’elle pleure, qu’elle « surpleure » – Laissez-la « surpleurer » ! | bis
Si elle a l’amour en tête,
Moi, je ne l’ai pas ! »
O gué gué…

Le lendemain de sa noce – Chez sa mère, elle s’en va | bis
« Vous m’avez fait prendre un homme
Que jamais je n’aimerai ! »
O gué gué…

« Console-toi, ma fille, peut-être il en mourra ! | bis
Tu seras l’héritière
De tout ce qu’il y aura ! »
O gué gué…

« Au diable la fortune – Quand il n’y a pas de plaisir ! | bis
J’aimerais mieux un jeune bien éveillé,
Il remuerait la paille,
Il ferait fuir les rats ! »
O gué gué…

J’aimerais mieux Bernòta et ses trois mille francs | bis
Que cette vieille rosse
Avec tout son argent ! »
O gué gué…

Constance Manoux

Constance Manoux, agricultrice maintenant à la retraite, a toujours vécu sur le Plateau de Millevaches. Elle habite Laval de Sornac. Traditionnellement, on chante beaucoup dans sa famille. Les airs lui viennent de sa mère, de sa grand’mère. Elle aime les retrouver et les faire partager.

 

10 Marche de noce dite « de l’Arabe »

Jean-Pierre Champeval et Jean-Michel Ponty – violons

Les marches étaient longues, répétitives.

« L’Arabe » était un violoneux bien connu dans la région d’Egletons-Chaumeil au début du siècle. Son surnom lui vient de son « séjour » en Afrique du Nord, pendant son service militaire. Ses airs n’avaient-ils pas des consonances de musique arabe ?

 

Face B

1 – « Quand lou marle es din lou pra… »

Daniel Caraminot – accordéon, Jean-Michel Ponty – vielle

Polka.

« Quand le merle est dans le pré
ll lève la queue,
Il lève la queue
Et marque le pas… »

 

2 – Le chaudronnier

Marcelle Delpastre

Chanson du désordre : La boulangère est seule, les plats sont cassés ; le chaudronnier sera puni, brûlé. (19e siècle)

 

3 – Valse « de Nard »

François Maltieu [Malthieu] – violon

Les violoneux jouaient « de routine », des airs qu’ils avaient entendus ; ils les enjolivaient, les faisaient leurs. Nard était un musicien d’Ussel que François Maltieu [Malthieu] a bien connu.

 

4 – Céline

Marcelle Delpastre

Chanson du 19e siècle, connue pas seulement en Limousin et probablement répandue par les colporteurs.

 

5 – Valse de St-Salvadour

Jean-Pierre Champeval et Jean-Michel Ponty, violons

Valse connue de la plupart des violoneux corréziens, jouée surtout dans la région de St-Salvadour, d’où son nom !

 

6 – La Margui

Constance Manoux

Chanson du « désordre » : un mari benêt, cocu, un âne mangé par le loup… Le meunier est souvent représenté comme le Malin, qui sait profiter de son argent et prendre la femme des autres.

QUAND LA MARGUI…

Quand la Margui vai au molin
Tot en fialar sa conelha de brin
Montada sus son asne
Marilin trin trin
Marilan tran tran
Montada sus son asne
En anant au molin.

Quand lo mounier la vei venir,
De rire ne se pôt tenir !
« Estacha-qui ton asne
Marilin…
Veni t’assetar aqui ! »

Quand lo mounier embraçava la Margui,
Lo lop minjava l’asne
Marilin…
A la porta dau molin.

« Bogre de mounier tu m’embraças
Mas ma mula en es creva !
Que vai dire nostre òme
En arrivar chas nos ? »

« Ai cinc escuts dins mon pochon,
Prenetz ne’n dos, laissatz m’en tres ;
Vei t’en ‘chaptar’n autre asne
Per anar au molin ! »

Quand son òme la vei venir,
De faschar pòt pas se tenir :
« Qu’as-tu fait de nostre asne,
En anar au molin ?

Nostre asne avià los quatre pès blancs,
Los dos darrier, los dos davant,
La reja dau cuou negre,
Quo lï anava tant ben ! »

« Bogre de lordaud, sabes-tu pas,
Qu’au mes d’abriau,
Totas las bestias chamnhan de piau ?
Aitau a fait nostre asne,
En anant au molin ! » !

 

QUAND LA MARGUI…

Quand la Margui va au moulin
Tout en filant sa quenouille de chanvre
Montée sur son âne
Marilin trin trin
Marilan tran tran
Montée sur son âne
En allant au moulin.

Quand le meunier la voit venir,
De rire, il ne peut pas se tenir !
« Attache ici ton âne
Marilin…
Viens t’asseoir ici ! »

Pendant que le meunier embrassait la Margui,
Le loup mangeait l’âne
Marilin…
A la porte du moulin.

« Bougre de meunier tu m’embrassais
Mais ma mule en est crevée
Que va dire notre homme
En arrivant chez nous ? »

« J’ai cinq écus dans mon gousset
Prends-en deux, laisse m’en trois ;
Vas t’en acheter un autre âne,
Pour venir au moulin ? »

Quand son homme la voit venir,
De se fâcher, il ne peut se retenir :
Qu’as-tu fait de notre âne,
En allant au moulin ?

Notre âne avait les quatre pieds blancs,
Les deux derrière, les deux devant,
La raie du cul noire
Ça lui allait si bien ! »

« Bougre de lourdaud, ne sais-tu pas,
Qu’au mois d’avril,
Toutes les bêtes changent de peau ?
Ainsi a fait notre âne,
En allant au moulin ! »

 

7 – Scottisch

Jean-Pierre Champeval, violon – Jean-Michel Ponty, vielle.

La scottisch était une danse moins connue et moins populaire que la bourrée ou la valse.

 

8 – Les trois voleurs et la vieille – Los tre lairons e la vielha

Marcelle Delpastre

Conte mythique du Mont-Gargan.

L’oralité du récit en préserve toute la verve et la truculence.

LOS TRE LAIRONS E LA VIELHA

Quo era daus brigands, d’aquilhs que van au gach de las casquetas, sabetz. i en avia qui, dins lo temps, que ne’n vivian ; chas nos se’n sovenan de n’aver vist. Van au pan, o be van au gach de las casquetas, a gach a pan de chamin, quo es la mesma… quo es parier. E quo n’avia pas ben raportat dins quilhs temps. Quo fai qu’avian minjat ço qu’avian pogut.

N’i avia un, m’es d’avis, qu’avia minjat b’assatz de miau, quo l’avia encoconat, quand volia pausar pantalons, ne’n podia pas far mas gròs coma un petit chat, mai d’engueras en se retòrcer.

N’i en avia ‘n autre qu’avia minjat tròp de prunas, quo li avia balhat ‘na perça-plais, fasia res pus mas correr.

E n’i en avia ‘n autre qu’avia minjat quauqua poma e avia buegut dau citre doç – avia ‘trapat dau citre doç en quauqu’un luec – quo li avia balhat un mau de ventre ! Podia res pus far mas se retòrcer.

Se troberan tots tres, disseran :

« Quo vai pas. Chaudria be viuvre tot parier ! »

A fòrça de calcular, i en aguet un que disset :

« leu sabe ‘na vielha, tota sola, lai, dins una maison… Beleu que fariam un pauc d’afars. »

Quo fai que se prengueran tots tres, e lai ‘neran. S’aproismeran de la maison, de la pòrta ; la pòrta avia quauquas fendas, era coma la nòstra, barrava pas tant ben !… E de ‘visar per la fenda de la pòrta. Per la fenda d’aquela pòrta, vesian ‘na vielha. Era entre sos landiers e firgonava quauqua res dins sas brasas, mas vesian pas deque : gran, gran, gran, firgonava… Que fai lai ? Disian desja qu’era un pauc sortiera. Se calculavan. Tot d’un còp la vielha disset :

« Ten, ço-ditz, tu qui t’empestas, tu qui t’enfoiras, tu qui t’entòrces, tots tres per lo virolet de mon cuòu passaretz ! »

Sabetz pas ça que fasia, la vielha ? E be avia mes còser per son merende ‘na gôra que s’enfoirava en grilhant,‘na poma reineta que se retorcia e ‘na chastanha que petonava. Mas los tres galhards, quand auvigueran la vielha qui disia aitau : « Tu qui t’empestas, tu qui t’enfoiras, tu qui t’entorces, tots tres per lo virolet de mon cuòu passaretz, setz segur que queu qui s’empetava, queu qui s’enfoirava, queu qui se torcia, e be partigueran d’aqui e demanderan pas lor compte ! »

 

LES TROIS VOLEURS ET LA VIEILLE

C’était des brigands, de ceux qui vont au gué des casquettes, vous savez. Il y en avait, ici, dans le temps, qui en vivaient ; « chez nous » se souviennent d’en avoir vu. Ils vont à l’affût des casquettes, au guet sur les chemins, c’est la même chose, c’est pareil. Et ça n’avait pas bien rapporté en ces temps-là. Ce qui fait qu’ils avaient mangé ce qu’ils avaient pu.

Il y en avait un, à mon avis, qui avait mangé tellement de miel que ça l’avait constipé ; quand il voulait poser pantalons, il ne pouvait pas faire plus gros qu’un petit chat, et encore en se tordant.

Il y en avait un autre qui avait mangé trop de prunes ; ça lui avait donné une diarrhée !… il ne faisait rien d’autre que de courir.

Et il y en avait un autre qui avait mangé quelques pommes et bu du cidre doux – il avait pris du cidre doux quelque part – ça lui avait donné un mal de ventre !… Il ne pouvait rien faire d’autre que de se tordre.

Ils se retrouvèrent, tous trois ; ils dirent :

« Ça ne va pas. Il faut bien vivre quand même ! »

A force de calculer, il y en eut un qui dit :

« Je connais une vieille, toute seule, là-bas, dans une maison… Peut-être que nous pourrions y faire quelques affaires. »

Ce qui fait qu’ils se décidèrent tous les trois, et ils y allèrent. Ils s’approchèrent de la maison, de la porte ; la porte avait quelques fentes, elle était comme la nôtre, elle ne fermait pas tellement bien !… Et de regarder par la fente de la porte. Par la fente de cette porte, ils voyaient une vieille. Elle était entre ses landiers et grattait quelque chose dans ses braises, mais ils ne voyaient pas quoi ; gran, gran, gran, elle grattait. Qu’est-ce qu’elle fait là ? On disait déjà qu’elle était un peu sorcière. Ils calculaient. Tout d’un coup la vieille dit :

« Tiens, dit-elle, toi qui te pètes, toit qui te foires, toi qui te tords, tous trois par le virolet de mon cul vous passerez ! »

Vous ne savez pas ce qu’elle faisait, la vieille ? Eh bien elle avait mis cuire pour son repas de midi, un boudin qui « s’enfoirait » en grillant, une pomme reinette qui se tordait et une châtaigne qui pétait doucement.

Mais les trois gaillards, quand ils entendirent la vieille qui disait ainsi : « Toi qui te pètes, toi qui te foires, toi qui te tords, tous trois par le virolet de mon cul vous passerez, soyez sûr que celui qui se pétait, celui qui se foirait, celui qui se tordait, eh bien ils partirent de là et ne demandèrent pas leur compte ! »

Tales, Folk music, songs of love and sadness, take root in the heart of the limousine mountain.

We did not have to go very far away to find them.

They were close at hand.

We just listened to them and heard them emerged again as clear, as the water from the springs of the « Plateau de Millevaches ».

We thank everybody who made it possible for us to rediscover them and bring them to you.